Antoine Mesnier : Le cœur, le cerveau et les jambes

Reconnu pour ses qualités humaines, ses connaissances médicales et son intuition hors du commun, Antoine Mesnier est l’un des médecins généralistes les plus connus de Bordeaux. Engagé et respecté, aussi bien dans le monde de la santé que dans l’univers du rugby ou dans la sphère publique, cet homme de 63 ans aux multiples casquettes, qui croque la vie parfois jusqu’à l’épuisement, ne laisse aucun de ses interlocuteurs indifférents. Portrait d’un surdoué.

Octobre 2021 

La file d’attente ne désemplit jamais devant la porte du cabinet médical d’Antoine Mesnier. Chaque jour, les Bordelais se bousculent pour recevoir le diagnostic et les conseils de ce généraliste parfois dépassé par sa propre notoriété. Ce qui le distingue ? La finesse de son analyse médicale d’abord. Sa capacité à trouver les bons traitements et, si nécessaire, à mobiliser les plus grands spécialistes ensuite. Mais pas que. Profondément humain, Antoine Mesnier a le contact facile, l’oreille attentive et le regard bienveillant. À la fois pragmatique et empathique, celui qui reçoit entre 50 et 70 patients au quotidien est sans doute l’un des généralistes les plus connus de la ville. L’ancien médecin des Girondins de Bordeaux ne cherche pourtant pas la gloire. Ce qui motive ce bourreau de travail qui ne compte pas ses heures ? Être utile. Utile à tous et tout le temps. « Ce qui le caractérise, au-delà de ses compétences médicales, ce sont sa serviabilité et sa générosité », témoigne Hugues Martin, ancien maire de Bordeaux qui est également un ami proche de celui qui accumulera les responsabilités en qualité de professionnel de santé, bien sûr, mais aussi en tant que citoyen. Bordelais de naissance et farouchement attaché à sa région, cet ancien rugbyman qui aime rire et échanger se pose très vite comme un homme de terrain respecté et écouté. Par ses patients et par les élus locaux qui voient en lui un ambassadeur de la société civile. « Antoine Mesnier, c’est le cœur, la tête et les jambes, résume le fondateur du groupe Cassous, Henri Cassous. C’est un ancien grand sportif qui est extrêmement intelligent et qui se met vraiment à la disposition des autres. Un homme complet qui ne laisse pas son interlocuteur indifférent. » Mais qu’on ne s’y trompe pas. Derrière ses qualités humaines et son énergie hors du commun – qu’il dépense parfois jusqu’à s’en rendre malade – se cachent des blessures de la vie. Celles qu’on garde pour soi. Qu’on apprivoise. Qu’on transforme en force, puis qu’on met entièrement au service des autres. 

« C'est un homme extrêmement intelligent qui se met vraiment à la disposition des autres. Un homme complet qui ne laisse pas son interlocuteur indifférent »

Henri Cassous, Fondateur, Groupe Casous

Coup du sort

« J’ai toujours voulu être médecin », confirme ce fils d'hématologue qui, très jeune, admire les soignants qu’il côtoie. Plus particulièrement ceux qui exercent à la campagne : « J’ai le sentiment que, là où il passe, le médecin procure un grand bonheur à ses patients. Ils l’attendent comme le Messie. Je trouve ça incroyable. » Bon élève, Antoine Mesnier suit un parcours classique dans les meilleurs établissements privés de l’ouest bordelais. Un élève modèle ? Pas tout à fait. Le jeune homme ne rentre pas dans le moule préconçu, préétabli. Joueur au sein du stade bordelais, le jeune rugbyman aspire à bouger, courir, plaquer, marquer. Si bien que ses parents iront jusqu’à lui préconiser de passer non pas le concours de médecine, mais celui de professeur de sport. Coup du sort : une entorse à la cheville empêchera l’étudiant de se présenter aux épreuves. « Je décide donc de suivre mon instinct et de m’inscrire en médecine », affirme celui qui vit sa première année comme un athlète prépare les Jeux olympiques. Travail, repos, sport… Tout est cadré, prévu, organisé. Une stratégie payante puisque, sur 3 000 élèves reçus, Antoine Mesnier se classe à la 27e position. Une performance.  « C’est, après la naissance de mes deux enfants, la plus grande joie de ma vie », se souvient celui qui s’offre, en prime, le luxe de choisir la spécialité qu’il veut. Mais sa décision est prise depuis longtemps : il sera généraliste.

« Dans la plupart des cas, je sais si un patient a quelque chose de grave rien qu’en l’observant »

Antoine Mesnier

Antoine Mesnier à son cabinet de Caudéran.

La réciprocité des relations avec les patients

Une fois ses études terminées, il rencontre un médecin en fin de carrière installé dans le quartier de Caudéran (où il a toujours vécu). « Il me propose de m’associer avec lui pour reprendre son cabinet ensuite », explique celui qui pose sa plaque en 1982, mais qui doit néanmoins se forger sa propre clientèle. Oui mais voilà : comment se faire connaître lorsqu’on est jeune médecin ? Comment se créer une clientèle ? « Je fixais des rendez-vous à plusieurs patients à la même heure pour donner l’impression que j’étais très occupé », se souvient l’intéressé avec humour et non sans une pointe de roublardise.

Parce qu’il aime le contact et qu’il a le verbe facile, Antoine Mesnier part à la rencontre des commerçants du quartier. De la boulangerie, à la boucherie, en passant par la pharmacie. Et ça marche. Au bout d’un an, il se fait un nom et reçoit jusqu’à 30 patients par jour. Pour son plus grand bonheur. « J’aime la réciprocité des relations que je noue avec les patients, confie le médecin. Je suis à leur écoute et eux, en parallèle, me font confiance et m’apportent de la considération. » Parce que sa clientèle devient trop importante. Antoine Mesnier s’associe avec un confrère. Une association qui perdurera plus de vingt-cinq ans. Toujours dans le quartier de Caudéran. 

Intuition et mémorisation

Homme de terrain, Antoine Mesnier se pose également comme un scientifique éclairé qui n’aura de cesse de perfectionner ses connaissances médicales. Insomniaque, il passe ses nuits à parcourir des articles scientifiques, des analyses, des comptes rendus. Mais aussi des livres de philosophie, de sociologie, de psychologie… « En tant que médecin, on est obligé de se former en permanence. Au début de ma carrière, nous n’avions ni Internet ni téléphone portable. Nous exercions de façon très différente par rapport à aujourd’hui. » Convié à diverses conférences et divers groupes de réflexion à l’hôpital, dans des centres médicaux ou même au sein d’organisations privées, le généraliste se fait un nom dans la sphère bordelaise et noue des relations solides et profondes avec un grand nombre d’experts. Des échanges, des rencontres, des témoignages et des débats qui lui permettent d’aiguiser son instinct, son intuition, son flair. C’est d’ailleurs ce que recherchent ceux qui viennent le consulter.  « Dans la plupart des cas, je sais si un patient a quelque chose de grave rien qu’en l’observant », confie l’intéressé qui est également réputé et plébiscité pour sa mémoire infaillible. « Il se souvient de tout, confirme Henri Cassous. C’est absolument extraordinaire. »

Médecin de stars

Hyperactif, Antoine Mesnier est sur tous les fronts dans le courant des années 1990. Lorsqu’il n’est pas en visite chez un patient ou en consultation dans son cabinet médical, il s’occupe des footballeurs – Bixente Lizarazu ou Zinedine Zidane… – des Girondins de Bordeaux, club dont il est le médecin officiel. Une responsabilité qui lui vaut de faire parfois la une des médias locaux. « Lors de déplacements, j’étais souvent alpagué par les journalistes qui me demandaient des nouvelles de la santé des joueurs. C’était amusant et plutôt valorisant », se souvient celui qui reconnaît sa double casquette : celle du médecin de proximité qui pleure aux côtés de ses patients malades et celle du médecin de stars qui « bichonne » les célébrités du ballon rond et fréquente, avec eux, hôtels et restaurants de luxe. Une double casquette qui permet à cet hypersensible d’assouvir deux besoins vitaux : être utile, d’un côté. Être reconnu, de l’autre.

« Il bat, aujourd’hui encore, des records en matière de nombre de patients soignés par jour. » 

Hugues Martin, ancien maire de Bordeaux 

Sportif, bénévole, citoyen

« Je l’avoue, je ne sais pas dire non, lorsqu’on me sollicite », poursuit le médecin qui ne peut s’empêcher de multiplier les responsabilités au sein d'associations humanitaires pour prendre en charge des orphelinats depuis Bordeaux. Ou encore dans le cadre de sa passion de toujours : le rugby. Comme joueur, jusqu’à ses 35 ans. Puis comme président du Stade bordelais de 1994 à 1998. Une fonction dans laquelle il s’investit pleinement et à la demande de ses anciens coéquipiers. « J’enchaînais les réunions, les déplacements, les rencontres avec les responsables publics, les recherches de subventions, les négociations avec les sponsors… », raconte ce passionné de l’ovalie qui amorcera la fusion entre le stade bordelais et le club athlétique de Bègles. Fusion qui donnera naissance à l’UBB, club qui évolue en Top 14 et qu’il continue, aujourd’hui encore, de soutenir dès qu’il le peut, depuis les gradins du stade Chaban-Delmas.

Et ce n’est pas tout. Au-delà de ses engagements professionnels, associatifs et sportifs, Antoine Mesnier est également un citoyen actif. Surtout lorsqu’il s’agit de sa ville. Pas question de prendre parti pour telle ou telle famille politique. Mais plutôt de se faire le témoin du quotidien des Bordelais. À ce titre, il n’hésite pas à tirer la sonnette d’alarme, à donner son avis, à soumettre des idées aussi bien à des responsables publics qu’à des chefs d’entreprises de renom comme Henri Cassous ou Denis Mollat qui sont devenus, au fur et à mesure des années, des amis proches.

Son livre "Docteur maison" s'écoulera à plus de 20 000 exemplaires.
Antoine Mesnier en compagnie de son ami Serge Simon, l'actuel vice-président de la Fédération française de rugby.

« Il a une grande mémoire et se souvient de tout. C’est absolument extraordinaire. »

Henri Cassous, fondateur du groupe Cassous 

« Docteur maison »

Si cette accumulation de responsabilités est source de bonheur et d’épanouissement, elle lui causera également des torts. Sur le plan de sa vie privée, d’abord. Et celui de sa santé, ensuite. C’est à l’occasion d’un enseignement universitaire de 2013 au sujet du burn-out, qu’il prend conscience de son degré d’épuisement. Pour sortir de cette mauvaise passe, il décide, comme thérapie, de prendre la plume. De jongler avec les mots pour raconter sa vie de soignant, retracer les situations difficiles qu’il rencontre, témoigner de son engagement en faveur de la médecine du quotidien qui perd progressivement ses lettres de noblesse… Une série de chroniques publiées sur un blog : « Docteur Maison », en référence à la série Docteur House. Une initiative qui trouve rapidement son public. Si bien qu’Antoine Mesnier est contacté par plusieurs maisons d’édition afin de transformer l’essai en livre. Après quelques hésitations, il se lance dans l’aventure littéraire, mais à une condition : que les recettes de l’ouvrage soient entièrement reversées à la lutte contre le cancer. L’éditeur accepte. Le succès est au rendez-vous. Dès la parution de son livre — qui se vendra à plus de 20 000 exemplaires — Antoine Mesnier est sollicité par les médias nationaux, interpellés par témoignage à la fois humain, vivant et sans tabou de la vie d’un médecin de proximité.

Portrait bordelais 

  •  S’il n’était pas médecin ? Il serait chauffeur de taxi. « Parce que j’ai une bonne mémoire et que j’aime discuter avec des inconnus. » 
  • Son restaurant préféré ? Le Noailles, allées de Tourny. 
  • Son vin préféré ? Château chasse-spleen. « Parce que j’aime à la fois le vin et le nom du château. »
  • Son monument préféré à Bordeaux ? Le stade Chaban-Delmas, « évidemment ».
  • Et s’il ne vivait pas à Bordeaux ? Il serait à Saint-Étienne de Baigorry, au cœur du Pays basque. 
  • Le Bordelais qui l’a le plus marqué ? Henri Cassous, fondateur du groupe Cassous.
  • Bordeaux en un mot ?  « Ma vie. »

Libre

« Ça m'a permis de guérir de mon burn-out », reconnaît celui qui conserve toutefois une charge de travail élevée. Difficile de refuser de soigner ceux qui souffrent. Difficile de changer de rythme lorsque l’on a passé sa vie à glorifier la valeur travail. « Il bat, aujourd’hui encore, des records en matière de nombre de patients soignés par jour, précise Hugues Martin, avec bienveillance et amitié. Il est un des médecins les plus connus et reconnus de Bordeaux. » Et pourtant, il rêve, en secret, de tout quitter pour partir vivre au cœur des montagnes basques. Comme médecin de campagne ? Pas tout à fait. « J’aurai toujours à cœur de soulager la peine des autres, confesse-t-il. Mais avec davantage de distance et sans contrepartie matérielle. » Comme un homme tranquille et serein. Comme un homme libre, aussi. Libre de toute obligation. Libre de poser son téléphone et de prendre, enfin, le temps de vivre, de souffler, de profiter. Qui pourrait décemment le lui refuser ?

Crédit photo : Edouard Barbazange

Réalisation & référencement Simplébo

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